à mon arrière grand-père, mon grand-père et mon grand oncle, tous trois dockers au port de Nantes.
« La loi des quais était celle des dockers. [...] Ils régnaient, faisaient bosser qui ils voulaient, viraient qui ils voulaient. La toute-puissance, croc sur l'épaule, gants de travail dans la poche arrière. A la Marlon Brando. Mais, c'est fini tout ça. L'embauche à la criée, la dictature des bordées, c'est du passé. La cloche d'appel ne sonne plus, devenue pièce de musée. [...] Le port […] aujourd'hui, c'est une science de l'étagère. Des milliers et des milliers de boîtes géantes et multicolores empilées, rangées et alignées sur des centaines d'hectares arrachés à l'estuaire du marais. De loin, on dirait une ville aveugle, robotisée[1]. » Ainsi se résume en quelques lignes l’évolution sociale à laquelle ont été confrontés, en une trentaine d’années, les manutentionnaires du port. Au cours de ce dossier il sera étudié la manière dont le droit social accompagne l’évolution du milieu portuaire pour ses ouvriers emblématiques : les dockers.
La protection sociale se définit comme désignant « tous les mécanismes de prévoyance collective, permettant aux individus de faire face aux conséquences financières des risques sociaux ». Ces risques sociaux sont des situations « susceptibles de compromettre la sécurité économique de l’individu ou de sa famille[2] ». Il s’agit en ce sens d’éléments comme la vieillesse, la maladie, l’invalidité, le chômage, la maternité, etc. En droit interne, le terme angliciste de docker n’est quant à lui juridiquement pas défini. Il convient donc d’en faire une approche pratique et communément admise en le définissant comme l’« ouvrier employé au chargement et au déchargement des navires[3] ». L’expression « protection sociale des dockers » fait donc référence à l’étude des mécanismes juridiques existants afin de garantir un niveau de revenus et de prestations sociales minimum aux dockers. Il sera ici traité du cadre général, c’est-à-dire légal, de ce régime juridique avant d’en étudier les lacunes prépondérantes.
Historiquement, les dockers étaient considérés comme une corporation, un bastion parfois du syndicalisme et de la lutte sociale[4]. Ainsi, les syndicats avaient la main mise sur certaines questions sociales notamment la délivrance des cartes prioritaires d’embauche, étudiées plus loin dans ce dossier, avant que l’Etat ne se saisisse du métier de docker en le professionnalisant. Cette époque d’intervention étatique débutant en 1941[5] a connu son apogée en 1947 avec une loi du 6 septembre venant officiellement professionnaliser le métier de docker. Puis, la loi du 9 juin 1992 a fait basculer les dockers dans le droit commun du travail en donnant une priorité d’embauche aux dockers professionnels mensualisés (à temps plein) sur les dockers professionnels intermittents restés sous le régime de 1947. Qu’est-ce que la différence entre ces deux régimes ? Les dockers soumis au régime de 1992 seront maintenant sous l’autorité directe de l’entreprise et risquent le licenciement. Cela leur apporte toutefois certains avantages issus du Code du travail concernant notamment la santé et sécurité au travail. Finalement, la troisième grande réforme concernant le milieu des quais est celle de 2008, s’inscrivant dans la décentralisation et qui concerne directement les ouvriers travaillant sur les grands ports maritimes, anciennement appelés ports autonomes. Cette loi procède ainsi à un rapprochement du régime d’emploi des grutiers dans les grands ports maritimes au régime existant pour celui des dockers[6]. Tout cela a abouti à une Convention collective de travail en 2011 sur la manutention portuaire, dont l’étude approfondie sera faite dans ce dossier.
Si les syndicats ont pu apporter beaucoup au régime social des dockers et continuent d’ailleurs de le faire en obtenant des adaptations des réformes comme celle du droit du travail[7] en 2017 ou sur l’âge du départ à la retraite[8], aujourd’hui de manière globale cette protection sociale est jugée insuffisante par nombre d’ouvriers. En mettant fin au particularisme de l’écosystème des quais et en récupérant la compétence du contrôle du recrutement des dockers occasionnels au détriment des ports, l’Etat français semble avoir pourtant permis de nombreuses avancées sociales, solidement ancrées dans un droit dur, notamment face à la mondialisation.
Il convient donc de se demander si le droit en vigueur garantie un niveau suffisant de protection sociale des dockers en France.
Le docker est un ouvrier présent sur chaque Etat ayant une façade maritime et qu’il est donc possible de trouver sur une grande majorité des pays. Ainsi il eut été logique que le droit international sous la houlette notamment de l’Organisation internationale du travail, leur consacre une attention particulière afin de leur garantir un niveau minimum de protection. Sans grande surprise il sera ici démontré que les normes internationales concernant les dockers sont assez lacunaires et généralistes. C’est le droit français interne qui a permis d’approfondir la question sociale des dockers, tout en omettant pourtant de traiter de sérieux aspects inhérents à la profession. Ainsi, si la protection sociale des dockers en France a été rendue possible pas la nationalisation d’un régime récent et palliatif (I), celui-ci s’avère pourtant sur certains points inadapté et déconnecté de la réalité du métier (II).
I) La protection sociale des dockers en France, la nationalisation d’un régime récent et palliatif
Les Dockers sont peu pris en considération par le droit international public qui ne se contente que de conventions très générales et trop peu nombreuses (A). Le droit national quant a lui, après avoir récupéré des compétences en matière d’emploi des dockers a permis rapidement, bien que tardivement, des avancées notables en la matière venant pallier ces carences internationales (B).
A) Les carences d’un droit international peu protecteur des dockers
Le droit international s’est intéressé assez tardivement à la question des dockers. Si l’Organisation internationale du travail (OIT) est rattachée depuis 1946 à l’ONU, il faut attendre 1973 pour que la Convention concernant les dockers[9] ne voit le jour. Certes, d’autres textes ont été adoptés dès 1932 comme la Convention n°32 sur la protection des dockers contre les accidents, mais celle de 1973 est la seule toujours en vigueur aujourd’hui. Elle ne semble cependant ne s’intéresser que très peu à la protection sociale des dockers. Pour bien comprendre le sens de cette Convention, il faut ainsi remonter à son essence et son contexte.
En propos préliminaires, la Convention sur le travail dans les ports de 1973 rappelle « que les méthodes de manutention dans les ports se sont modifiées et continuent à subir d'importantes modifications -- par exemple par l'adoption d'unités de charge, l'introduction des techniques de transbordement horizontal (roll-on/roll-off), la mécanisation et l'automatisation accrues --, tandis que des nouvelles tendances apparaissent dans le mouvement des marchandises; que pareilles modifications risquent d'être encore plus prononcées à l'avenir ». Le premier objectif de la Convention est donc posé : faire en sorte que la profession de docker puisse évoluer dans un environnement en changement constant, à l’aube de la mondialisation.
En droit interne le statut des dockers posé par la loi de 1947, garante d’une première protection à leur égard, mais le monde a considérablement changé de paradigme en l’espace d’une vingtaine d’années. Il était donc normal et important que la scène internationale, par le biais de l’OIT, se saisisse de la question de ces travailleurs qui participent à cette mondialisation. Cependant cette Convention qui s’applique toujours aujourd’hui poursuit en rappelant « que ces changements, en accélérant le transport des marchandises, en réduisant le temps passé par les navires dans les ports et en abaissant les coûts des transports, peuvent être dans l'intérêt de l'économie du pays intéressé dans son ensemble et contribuer à élever le niveau de vie ». Tout l’esprit du régime international des dockers est ici exprimé : la protection sociale des dockers doit aller de pair avec les intérêts économiques de leur pays et vice-versa. Qu’est-ce que cela signifie concrètement ? La Convention de l’OIT a au moins le mérite de ne leurrer personne et ne fait donc pas une interprétation manichéenne de la situation mondiale à laquelle sont confrontés les ouvriers du port mais tente au contraire de concilier ces deux aspects. Les intérêts économiques des Etats ne doivent donc pas se faire au détriment des dockers mais au contraire lesdits Etats doivent « adopter des mesures pour éviter ou diminuer les problèmes qui en découlent, sur le niveau de l’emploi et sur les conditions de travail et de vie des dockers ».
Ainsi, dès l’article 2 est posée l’obligation « à la politique nationale d'encourager tous les milieux intéressés à assurer aux dockers, dans la mesure du possible, un emploi permanent ou régulier ». Une fois cette règle générale dictée peu d’indications sont laissées aux Etats parties, le second alinéa de l’article 2 précisant simplement qu’« en tout état de cause, un minimum de périodes d'emploi ou un minimum de revenu doit être assuré aux dockers, dont l'ampleur et la nature dépendront de la situation économique et sociale du pays et du port dont il s'agit ». Chaque Etat est ainsi libre de déterminer ses propres règles selon son contexte économico-social, ce qui ne sort pas des règles habituelles du droit international public. Ce qui est regrettable en revanche est le fait que la Convention de 1973 semble évincer une grande partie des dockers que sont les intérimaires. L’article 3 de ladite Convention dispose en effet que non seulement les « dockers immatriculés (ceux ayant une carte professionnelle) auront priorité pour l'obtention d'un travail dans les ports », mais qu’en plus ceux-ci « devront se tenir prêts à travailler selon des modalités que la législation ou la pratique nationales détermineront », sans ne dire mot sur les autres dockers. Il est clair donc que les dockers occasionnels ne sont pas visés par cette protection sociale, chose surprenante lorsqu’il est connu qu’en 1982 le nombre de dockers intérimaires était de 13 400 en France[10].
Selon l’OIT elle-même[11], l’autre Convention applicable directement aux dockers est celle sur la sécurité et l’hygiène dans les manutentions portuaires, de 1979[12]. Cette dernière est importante en ce qu’elle oblige les Etats l’ayant ratifiée à « prendre des mesures visant l'aménagement et l'entretien des lieux de travail, des matériels ainsi que l'utilisation de méthodes de travail offrant des garanties de sécurité et de salubrité ; l'aménagement et l'entretien, sur tous les lieux de travail, de moyens d'accès garantissant la sécurité des travailleurs[13] ». Elle oblige également les Etat parties à développer « l'information, la formation et le contrôle indispensables pour garantir la protection des travailleurs contre les risques d'accident ou d'atteinte à la santé résultant de leur emploi[14] ». Il est vrai que la sécurité et l’hygiène au travail sont des domaines essentiels à contrôler dans la mesure où, malgré les avancées technologiques, la profession de docker reste dangereuse et usante. Le développement des outils de manutention n’annihile pas le transport de charges lourdes et créent d’ailleurs des dangers nouveaux.
En tout état de cause, si le droit international public met à disposition des Etats ces deux Conventions essentielles concernant l’emploi et la sécurité des dockers, ces conventions restent trop générales et parfois même lacunaires, oubliant tout un pan de la profession que sont les intérimaires ou dockers occasionnels. Le fait d’adopter des règles générales n’est pas un problème en soi, c’est le fonctionnement classique des conventions internationales. Le fait d’exclure les dockers occasionnels est en revanche problématique puisque de nombreux ouvriers ne bénéficient donc pas de cette protection internationale. Le droit interne français a récemment adopté des textes applicables à la profession de dockers, garantissant ainsi une protection plus effective que celle existante à l’échelon international ou précédemment en droit interne.
B) La protection sociale des dockers par un droit interne récent
Il a été vu précédemment que le premier statut légal des dockers en France date de 1947 et a été modifié en 1992 puis en 2008. Aujourd’hui, ce sont les articles L5343-1 et suivants du Code des transports qui traitent de la profession de docker. Le texte qui intéressera cette étude est le plus récent en la matière, c’est-à-dire la loi du 8 décembre 2015 tendant à consolider et clarifier l'organisation de la manutention dans les ports maritimes. Cette dernière, comme son nom l’indique, a permis de modifier et clarifier un certain nombre de dispositions du Code des transports en les adaptant d’une part à la situation actuelle des ports et d’autre part au respect du droit communautaire. Plus encore, la loi de 2015 précise les travaux qui sont prioritairement effectués par des ouvriers dockers. La liste des opérations pour lesquelles la priorité d’embauche n’est pas applicable est elle aussi complétée puisque y sont ajoutées les opérations de « déchargement ou de chargement des liquides transportés par des navires et des bateaux pétroliers, chimiquiers et gaziers ». Mais au-delà de réviser en profondeur la profession des dockers, la loi de 2015 a permis l’adoption de deux accords, tous deux du 17 décembre 2015, l’un relatif au régime de prévoyance des ouvriers dockers occasionnels et l’autre celui des dockers professionnels intermittents.
Si la loi de 2015 n’est pas directement à l’origine de ces deux régimes de prévoyance, elle y participe fortement d’abord en définissant les différents types de dockers, au nombre de trois désormais, mais également en donnant l’impulsion d’une réforme profonde de la profession. Ainsi concernant le premier type de dockers, les « dockers professionnels intermittents », ceux-ci sont définis en droit interne depuis 2015 comme étant « les ouvriers dockers qui étaient titulaires de la carte professionnelle au 1er janvier 1992 et qui n'ont pas conclu de contrat de travail à durée indéterminée (CDI) avec une entreprise de manutention portuaire ou avec un groupement d'entreprises de même objet[15] ». En somme donc, il s’agit des dockers professionnels bénéficiant d’un contrat à durée déterminée (CDD). Le second type de dockers, les « dockers occasionnels » quant à eux sont « les ouvriers dockers qui, afin d'exercer les travaux de manutention portuaire […] concluent avec une entreprise ou avec un groupement d'entreprises un contrat de travail à durée déterminée[16] », il s’agit donc des dockers sans carte professionnelle et titulaires d’un CDD.
En 2015 donc deux régimes de prévoyance sont prévus pour ces deux types de dockers particuliers[17]. Le régime bénéficiant aux dockers intermittents prévoit des garanties minimales en son article 4 qui couvrent : « l'incapacité temporaire de travail (ITT) après une franchise continue de 3 jours ; l'invalidité de 2e et 3e catégories ; l'incapacité permanente professionnelle (IPP) ; le décès et l'invalidité absolue et définitive (IAD) ». Le régime de prévoyance des dockers occasionnels est quant à lui sensiblement le même puisque son article 4 prévoit des garanties couvrant « l'incapacité temporaire de travail (ITT) après une franchise continue de 60 jours ; l'invalidité de 2e et 3e catégories ; l'incapacité permanente professionnelle (IPP) ; le décès et l'invalidité absolue et définitive (IAD) ». En dehors donc d’une franchise d’ITT beaucoup plus importante (57 jours de plus que pour les dockers intermittents), les deux régimes de prévoyance sont de manière globale très similaires, ce qui est très intéressant : l’assiette et la répartition des cotisations sont toutes deux à 50% de part patronale et 50% salariale[18] ; en cas de rupture du contrat de travail ouvrant droit à prise en charge par l'assurance chômage, le docker bénéficie du maintien de sa couverture prévoyance dans les deux cas[19] ; etc.
Ces régimes de prévoyance sont intégrés à la Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011. Celle-ci s’inscrit dans la lignée du droit internationale puisqu’elle précise dès son préambule « que la manutention portuaire est partout dans le monde une activité spécifique soumise aux contraintes de l'économie moderne, qui a fait l'objet de plusieurs conventions internationales de l'OIT, notamment la convention 137, telle qu'elle a été mise en œuvre par la législation française ». Ladite Convention se veut donc la transcription en droit interne des règles générales posées par la Convention 137 de l’OIT précédemment mentionnée. Il est vrai qu’en posant un régime de prévoyance pour les deux branches particulières des dockers ne rentrant pas dans la catégorie donc des dockers mensualisés, le droit interne se veut protecteur de l’intégralité de la profession, allant en ce sens plus loin que ce que prévoyait le droit international du travail.
Une grande avancée de cette Convention collective est notamment l’incorporation de deux dispositifs conventionnels concernant la cessation anticipée d’activités pour pénibilité. Ces deux dispositifs permettent ainsi aux dockers de partir à la retraite de manière anticipée, et le plus avantageux est que ces dispositifs sont cumulatifs et non alternatifs. Il s’agit ainsi du « dispositif conventionnel d'anticipation sur l'âge légal de la retraite » et du « dispositif complémentaire de cessation d'activité ». Pour bénéficier du premier, deux conditions doivent être remplies : « exercer ou avoir exercé un métier ou une fonction identifiée comme pénible au regard d'un ensemble de huit critères[20] ; faire état d'une ancienneté minimale de 15 années consécutives ou discontinues exercées dans un métier pénible ». Ce départ anticipé est de deux ans de moins que l’âge légal de départ à la retraite et les bénéficiaires obtiennent une allocation de cessation anticipée d’activité qui est en somme égale « à 65% d'un salaire de référence correspondant à la moyenne mensuelle des salaires bruts perçus au cours des douze derniers mois de pleine activité ». Pour bénéficier du second dispositif, seule la condition de l’ancienneté change passant ainsi de 15 à 18 années dans un métier pénible et ce dispositif offre quant à lui une allocation mensuelle, dans les mêmes conditions que la précédente.
Cette disposition est certes une grande avancée sur la protection sociale des dockers, mais semble être l’arbre cachant la forêt. Il suffit à cet effet de penser à la difficulté qu’ont les dockers de prouver dans la pratique le lien existant entre leur métier et leur mal-être physique. Beaucoup de choses restent à faire en ce sens.
II) La protection sociale des dockers en France, un régime juridique souvent inadapté et déconnecté de la réalité du métier
Le droit interne français a donc fait rentrer peu à peu le régime des dockers dans un droit qui n’était plus particulier pour une profession qui l’est restée. Ce faisant, d’importantes lacunes doivent être comblées dans la mesure où des domaines non négligeables ne font l’objet d’encore aucune protection. C’est le cas très important de la maladie des dockers (A). Toujours dans ce sens, en faisant entrer dans le droit commun du travail la profession de docker, l’Etat français met à mal leur priorité d’embauche qui faisait partie intégrante de la protection d’emploi des dockers (B).
A) La maladie des dockers non reconnue
Selon une étude de 2014[21], un peu plus de la moitié des dockers de Nantes St-Nazaire sont atteints d’un cancer. Cette affirmation dramatique suffit à elle seule à comprendre tout l’enjeu de la protection sociale des dockers, il en va littéralement de leur vie. Sur ce secteur géographique, une affaire récente permet d’illustrer les lacunes du droit en vigueur quant à la prise en charge de la santé des dockers, l’affaire Chagnolleau.
En septembre 2011, Jean-Luc Chagnolleau, docker au port de Nantes St-Nazaire meurt à seulement 54 ans des suites de deux cancers qu’il avait tenté, de son vivant, de faire reconnaitre comme maladie professionnelle, en vain. La famille du défunt soutenue par l’association de Loire-Atlantique pour la protection de la santé au travail dans les métiers portuaires (APPSTMP44) se sont battues pour faire reconnaitre les cancers de feu M. Chagnolleau comme maladie professionnelle. Les maladies de la thyroïde et du rein ne rentraient en effet pas dans la liste exhaustive desdites maladies alors même que leur métier par nature les fait entrer en contact avec des matériaux dangereux comme l’amiante, la silice, les bois exotiques, etc.
En 1955 déjà, les autorités portuaires alertaient les dockers sur les comportements à adopter face à certaines marchandises dans un petit manuel[22] débutant par ces propos « en dehors des risques d’accidents […], la manutention de certains corps peut provoquer des affections susceptibles d’être rangées dans la catégorie des maladies professionnelles inscrites soit dans les tableaux des maladies donnant droit à réparation ; soit dans le tableau des maladies donnant seulement lieu à une déclaration obligatoire du Médecin ». Ainsi par exemple sur le ciment, le petit manuel recommande aux dockers de « porter des lunettes et des gants de protection ainsi que des épaulières, prendre une douche après le travail », pour la manipulation des bois exotiques il leur faut « porter des gants et utiliser des crocs », une section est même consacrée aux rats où il est expressément recommandé « d’éviter le contact avec des rats crevés ». Cette formulation peut prêter à sourire, mais prise avec les autres elles sont un aveu très ancien de la dangerosité à laquelle sont confrontés chaque jour les dockers.
Comment se fait-il donc que les cancers, soit la maladie des dockers, ne soient pas considérés comme maladie professionnelle ? Il convient de se référer à l’alinéa 2 de l’article L461-1 du Code de la Sécurité sociale qui liste les maladies faisant l’objet du régime susmentionné. Si les symptômes ou maladies ne figurent pas dans cette liste légale, le docker devra se tourner vers son Comité régional de reconnaissance en maladies professionnelles. Ainsi, comme le rappelle l’APPSTMP44, « lorsque la maladie ne figure pas dans un tableau mais qu’elle résulte de l’activité professionnelle de la victime et a entraîné une incapacité permanente de 25 % au moins ou son décès, le collège de médecins doit se prononcer sur l’existence d’un lien « direct et essentiel » entre la maladie et le travail ». Il appartiendra au docker lui-même de prouver l’existence de ce lien, par tout moyen.
C’est précisément dans ce cadre que l’affaire Chagnolleau s’est déroulée. En 2011 et 2012, les Comités régionaux de reconnaissance en maladie professionnelle avaient dérouté la famille du défunt, ne trouvant aucun lien entre les cancers de l’ancien docker et son travail sur les quais. La famille saisit donc le Tribunal des affaires de sécurité sociale de Nantes (TASS) en première instance face à la Caisse primaire d’assurance maladie. Le TASS reconnaitra effectivement en 2014 l’existence d’un lien entre la profession de docker et la maladie de M. Chagnolleau. Grande avancée donc pour le droit et la protection sociale des dockers, mais de courte durée puisque la Caisse primaire d’assurance maladie a interjeté appel devant la Cour d’appel de Rennes qui, en février 2017, est revenue sur ce jugement estimant que « la preuve du lien entre les maladies et le métier de docker n'était pas rapportée[23] ».
L’affaire Chagnolleau n’est donc pas terminée puisque la Cour de cassation devra se prononcer sur l’issue à apporter au litige[24]. D’autres affaires similaires sont également en cours comme celle de Daniel Picaud, ancien docker de Nantes âgé de 67 ans victime de deux cancers : un du rein en 1995 à l’âge de 48 ans puis un autre de la prostate en 2014[25]. Cette fois-ci, les médecins ont bien établi un lien entre son activité et ses cancers, se souvenant sans doute de la récente affaire Chagnolleau. L’affaire devrait être jugée très prochainement par le Tribunal de Nantes. En 2017, le sénateur de Loire Atlantique Yannick Vaugrenard avait interpelé la Ministre de la Santé sur ces affaires en concluant, face à la position de cette dernière sur le sujet, « Madame la ministre, je souhaite que cette position soit revue, et que, au-delà des aspects administratifs que vous avez évoqués, l'aspect humain soit au cœur de la décision, avant que nous n'ayons, malheureusement, à intervenir au niveau européen pour faire entendre un minimum d'humanisme à la puissance publique française[26] ».
Parallèlement à cette grande lacune du droit social des dockers, une autre semble prendre place au fil des ans : la fin du régime de l’intermittence et de la priorité d’embauche sur les quais.
B) La priorité d’embauche des dockers intermittents et occasionnels menacée
Le particularisme de la profession des dockers a donné naissance à deux éléments essentiels et liés : la carte professionnelle d’une part et la priorité d’embauche de l’autre. Au siècle dernier, cette organisation spécifique des dockers s’est avérée nécessaire du fait de l’irrégularité du trafic maritime[27]. Si ce régime de priorité d’embauche a été instauré par l’Etat français dès la seconde guerre mondiale, en 1941, il convient de rappeler que peu le savent mais ce n’est ici qu’une reprise d’un régime qui existait déjà au sein des syndicats[28]. A la délivrance de cette carte syndicale, le titulaire s’engageait ainsi « du fait de sa présence à l’embauche d’effectuer tous les travaux qui lui seront désignés par l’employeur, aux prix et conditions de contrat collectif de Janvier 29[29] ». Raison pour laquelle il n’était pas rare d’entendre les dockers témoigner « si tu n’étais pas syndiqué, tu ne pouvais pas travailler[30] ». En nationalisant donc ce régime, l’Etat s’est fait le protecteur des dockers intermittents en garantissant à ceux-ci une priorité d’embauche permettant aux entreprises de recruter toute personne pour le chargement ou le déchargement des navires dès lors que les dockers professionnels disponibles étaient en nombre insuffisant.
Aujourd’hui ce régime est encore en place mais tend à battre de l’aile. L’article L5343-1 du Code des transports dispose ainsi que « dans les ports maritimes de commerce, les travaux de manutention portuaire sont réalisés par des ouvriers dockers, dans les conditions fixées au présent chapitre ». C’est le Décret n° 2016-951 du 11 juillet 2016 relatif à la manutention portuaire qui énumère la liste des opérations faisant l’objet de la priorité d’embauche, englobant assez largement d’ailleurs les différentes opérations de chargement et déchargement des navires. Pourquoi le régime de la priorité d’embauche des dockers tend à disparaître alors que celui-ci est prévu par les textes de lois et semble recouvrir une large partie des activités de manutention portuaire ?
De prime abord, il convient de répondre à cette interrogation en rappelant que, selon maître Robert Rézenthel, « depuis la publication de la loi du 9 juin 1992 (soit la grande réforme de la profession de dockers) aucune nouvelle carte de docker professionnel n’a été délivrée[31] ». Cela s’explique dans la mesure où les entreprises de manutention portuaire ont l’obligation de recruter les ouvriers dockers en priorité d’abord parmi les ouvriers dockers professionnels intermittents, donc ceux ayant déjà une carte de priorité d’embauche, puis seulement parmi les dockers occasionnels qui ont régulièrement travaillé sur le port au cours des 12 mois précédents. Cela signifie donc que la loi de 1992 consacre la possibilité pour les entreprises de mensualiser les dockers et donc de rompre avec le régime de l’intermittence. Le rapport législatif n°2873 du 17 juin 2015 précisait en ce sens que « la réforme de 1992, qui a conduit à la mensualisation des ouvriers dockers dans le cadre des entreprises privées de manutention grâce à la conclusion de contrats de travail à durée indéterminée, montre que le Gouvernement « a souhaité asseoir juridiquement et économiquement le métier d’ouvrier docker en l’intégrant dans l’entreprise privée de manutention ». Plus encore, il poursuit en précisant que « cette réforme a permis d’introduire progressivement le droit commun du travail dans le domaine de la manutention portuaire […] en prévoyant l’extinction du régime de l’intermittence (qui construit) un système socialement et économiquement encore plus précaire au travers d’une dérégulation généralisée[32] ».
Pourquoi donc la volonté de basculer d’un régime d’intermittence à un régime de temps plein est un mal ? Cela va de pair avec l’essence même de la profession qui est classiquement composée d’une grande majorité d’intermittents. Il a été vu précédemment que cette profession est des plus précaire, pénible, que les pathologies liées y sont nombreuses et rarement reconnues comme maladies professionnelles. C’est là typiquement une profession que peu souhaitent exercer de manière mensualisée, et si le travail à temps plein offre une multitude d’avantages (cotisations sociales, meilleure formation des ouvriers, revenus fixes, etc.), les inconvénients et la dangerosité du métier sont trop conséquents. En décourageant l’embauche intérimaire, le droit français semble s’éloigner encore une fois de la réalité du terrain, encouragé par le droit de l’Union européenne remettant à son tour en cause ce régime de priorité d’embauche[33]. La profession de docker ne saurait souffrir des mêmes acceptions que d’autres professions soumises au régime commun du droit du travail[34], sans que cela ne conduise à la perte prématurée de milliers d’ouvriers, et la route est encore longue en ce sens[35].
Bibliographie :
Articles :
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- 20MINUTES, « Nouvelle opération port mort : quelle retraite pour les dockers ? », 20minutes.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.20minutes.fr/societe/2689303-20200109-nouvelle-operation-ports-morts-9-janvier-retraite-dockers (consulté le 6 avril 2022)
Ouvrages :
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Textes juridiques :
- ASSEMBLEE NATIONALE, « Rapport n°2873 », assemblee-nationale.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r2873.asp#P112_21545 (consulté le 8 avril 2022)
- CJCE 18 juin 1998, Corsica Ferries France SA et Gruppo Antichi Ormeggiatori del porto di Genova Coop. arl. a., aff. C-266/96, Rec. CJCE I-3981
- Convention collective nationale unifiée ports et manutention du 15 avril 2011
- Convention de l’OIT n° 137 sur le travail dans les ports, 1973
- Convention de l’OIT n° 152 sur la sécurité et l'hygiène dans les manutentions portuaires, 1979
- Loi du 8 décembre 2015 tendant à consolider et clarifier l'organisation de la manutention dans les ports maritimes
- Régimes de prévoyance pour les ouvriers dockers intermittents et professionnels du 17 décembre 2015
- SENAT, « Reconnaissance des maladies des dockers », senat.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.senat.fr/questions/base/2017/qSEQ17120139S.html?fbclid=IwAR3mBkr0S2X7zuioG-FAFZtl8vGT76VH24rUAAi9jmORQHurp-i_I0VELw8 (consulté le 7 avril 2022)
Notes de bas de page :
[1] HUET, Philippe, « Les égarés de la plage », Paris, Albin Michel, 2017, 288 p. [2] VIE PUBLIQUE, « Qu’est-ce que la protection sociale ? », vie-publique.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.vie-publique.fr/fiches/24109-quest-ce-que-la-protection-sociale (consulté le 6 avril 2022) [3] LAROUSSE, Le grand Larousse illustré, 2021, Paris, Larousse, 2112 p. [4] PIGENET, Michel, « Les dockers. Retour sur le long processus de construction d'une identité collective en France, XIXe-XXe siècles », Genèses, vol. n°42, n°. 1, 2001, pp. 5-25. [5] La loi du 28 juin 1941 reconnaît aux dockers titulaires d’une carte professionnelle de priorité d’embauche une priorité d’accès aux opérations de manutention et organise la délivrance de ces cartes par un Bureau central de la main-d’œuvre (BCMO). [6] TEILLARD, Thibaud, « Avec la réforme portuaire, adieu les grutiers, vive les dockers ! », Le Marin, vendredi 13 mai 2011, p. 2. [7] LE POINT, « Code du travail : les dockers obtiennent une dérogation aux ordonnances », lepoint.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.lepoint.fr/economie/code-du-travail-les-dockers-obtiennent-une-derogation-aux-ordonnances-14-10-2017-2164520_28.php (consulté le 6 avril 2022) [8] 20MINUTES, « Nouvelle opération port mort : quelle retraite pour les dockers ? », 20minutes.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.20minutes.fr/societe/2689303-20200109-nouvelle-operation-ports-morts-9-janvier-retraite-dockers (consulté le 6 avril 2022) [9] Convention de l’OIT n° 137 sur le travail dans les ports, 1973 [10] JOB IN TREE, « Fiche métier : Docker », jobintree.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.jobintree.com/metier/docker-462.html (consulté le 6 avril 2022) [11] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, « Dockers », ilo.orf [en ligne]. Disponible sur : https://www.ilo.org/global/standards/subjects-covered-by-international-labour-standards/dock-workers/lang--fr/index.htm (consulté le 6 avril 2022) [12] Convention de l’OIT n° 152 sur la sécurité et l'hygiène dans les manutentions portuaires, 1979 [13] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, op. cit. [14] ORGANISATION INTERNATIONALE DU TRAVAIL, ibid. [15] Article L5343-4 Codes des Transports [16] Article L5343-6 Code des Transports [17] Pour information, le troisième type de dockers sont les « dockers mensualisés » qui « sont les ouvriers qui, afin d'exercer les travaux de manutention portuaire […], concluent avec une entreprise ou avec un groupement d'entreprises un contrat de travail à durée indéterminée » au sens de l’article L5343-3 du Code des Transports. Un docker intermittent qui signe un CDI est automatiquement considéré comme un docker mensualisé et ne garde sa carte professionnelle que si le CDI « est rompu à l'issue de la période d'essai ou du fait d'un licenciement pour motif économique, si ce licenciement n'est pas suivi d'un reclassement ou s'il est suivi d'un reclassement dans un emploi d'ouvrier docker professionnel », comme le prévoit l’article L5343-3 du Code des Transports. Un docker mensualisé qui rompt donc son CDI de lui-même ou qui se trouve congédié suite à une faute perdra sa carte professionnelle et ne pourra plus être considéré comme un docker professionnel intermittent lorsqu’il cherchera à nouveau à se faire embaucher. [18] Article 8 Accord du 17 décembre 2015 relatif au régime de prévoyance des ouvriers dockers occasionnels et Article 8 Accord du 17 décembre 2015 relatif au régime de prévoyance des ouvriers dockers intermittents [19] Article 5 Accord du 17 décembre 2015 relatif au régime de prévoyance des ouvriers dockers occasionnels et Article 5 Accord du 17 décembre 2015 relatif au régime de prévoyance des ouvriers dockers intermittents [20] La pénibilité s’observe à l’aune de huit critères que sont les conditions et rythmes de travail spécifiques, l’environnement agressif, l'atmosphère respirée, les nuisances sonores, les contraintes de température, les conditions météorologiques, les gestes et postures, des situations particulières d'attention. [21] « 53 % des dockers travaillant au sein du Grand Port Maritime de Nantes Saint-Nazaire seraient atteints de cancers ou décédés prématurément, les pathologies cancéreuses étant à l'origine de 67 % des décès » - Enjeux de santé au travail et cancers : les expositions à supprimer dans les métiers portuaires, une recherche-action sur le grand port maritime de Nantes-Saint-Nazaire [22] Extraits disponible sur le GUIDE POUR LES DOCKERS ET AGENTS PORTUAIRES de l’association de Loire-Atlantique pour la protection de la santé au travail dans les métiers portuaires [23] OUEST FRANCE, « Le docker a-t-il été tué par son travail ? », ouest-france.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/le-docker-t-il-ete-tue-par-son-travail-1389406 (consulté le 7 avril 2022) [24] 20MINUTES, « Le cancer d’un docker non reconnu comme maladie professionnelle » 20minutes.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.20minutes.fr/nantes/2011287-20170209-nantes-cancer-docker-non-reconnu-comme-maladie-professionnelle (consulté le 7 avril 2022) [25] OUEST FRANCE, « L’ex docker veut faire reconnaître ses cancers comme maladie professionnelle », ouest-france.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.ouest-france.fr/pays-de-la-loire/nantes-44000/nantes-l-ex-docker-veut-faire-reconnaitre-ses-cancers-comme-maladies-professionnelles-74310f04-26c9-11ec-b8e1-a5d0cfbb7050?fbclid=IwAR2g048nNOg-pjNKxaSTNmvJDt4udUhTJbr7h0MrP72QBBNEPboeOrZ1Ryw (consulté le 7 avril 2022) [26] SENAT, « Reconnaissance des maladies des dockers », senat.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.senat.fr/questions/base/2017/qSEQ17120139S.html?fbclid=IwAR3mBkr0S2X7zuioG-FAFZtl8vGT76VH24rUAAi9jmORQHurp-i_I0VELw8 (consulté le 7 avril 2022) [27] REZENTHEL, Robert, « Manutention portuaire », dans CHAUMETTE, Patrick (dir.), Droits maritimes, Dalloz, Paris, 2021, pp. 1370-1375 [28] Archives personnelles de l’auteur : carte professionnelle de priorité d’embauche de M. SALLAUD Benjamin, délivrée par le Syndicat des entrepreneurs de débarquements et manutention de la Rochelle-Pallice, 1929. [29] Archives personnelles de l’auteur, ibid. [30] Témoignage familial de l’auteur, d’anciens dockers des ports de Nantes et de la Rochelle. [31] REZENTHEL, Robert, op. cit. [32] ASSEMBLEE NATIONALE, « Rapport n°2873 », assemblee-nationale.fr [en ligne]. Disponible sur : https://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r2873.asp#P112_21545 (consulté le 8 avril 2022) [33] Dans son arrêt du 18 juin 1998, la Cour de justice des communautés européennes a estimé que le monopole des entreprises de manutention au port de Gênes était contraire au droit de la concurrence. Voir : CJCE 18 juin 1998, Corsica Ferries France SA et Gruppo Antichi Ormeggiatori del porto di Genova Coop. arl. a., aff. C-266/96, Rec. CJCE I-3981 [34] BASTA, « Être de gauche, c’est arrêter de mépriser les ouvriers », basta.media.fr [en ligne]. Disponible sur : https://basta.media/Karl-docker-Etre-de-gauche-c-est-arreter-de-mepriser-les-ouvriers (consulté le 8 avril 2022) [35] CHARBONNEAU, Alexandre, « Le régime social français des dockers emporté par le droit commun du travail ? », Annuaire de droit maritime et océanique, Nantes : Centre de droit maritime ; Paris : Ed. A. Pédone, 2013, XXXI, pp. 511 et s.
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